L'édito de Janvier 2021
Nous avions entamé les répétitions de La saga de Molière à Avignon depuis quelques jours et j’étais bien décidée, non sans prétention, à fabriquer un chef d’œuvre. J’avais fini par me persuader que je vivrais la même carrière que Molière, sachant qu’il avait longtemps souffert d’être un remarquable comédien comique sans la moindre étoffe tragique. A mon tour, je nous reprochai d’être des pitres sans étoffe.
J’espérais écrire une scène soutenue par les accords nocturnes de Chopin dans laquelle on parlerait de la vacuité de l’existence : « Vanités des vanités, tout n’est que vanité ! » Je demandais à Naïs, Anne-Sophie, Edith et Julie d’incarner ces mots avec émotion, celle qui confine parfois à un pur plaisir d’esthète, de celle que l’on touche quelque fois dans des moments de lucidité totale. Ce fût un cuisant échec. Je pensais en moi-même jusqu’à le dire à voix-haute : - « Mais alors quoi ?! Nous ne parviendrons jamais à écrire et à jouer quelque chose de beau ?! » Immédiatement après avoir prononcé cette phrase, il y eut une montagne dans ma tête dont le sommet était enneigé : « - Voilà ! » me disais-je en moi-même, « - Voilà la beauté, parfaite, majestueuse, inégalable. » L’heure du goûter avait sonné et je tombais sur un de ces proverbes que l’on trouve d’ordinaire dans des papillotes bon marché : « Tous les hommes pensent que le bonheur se trouve au sommet de la montagne alors qu’il réside dans la façon de la gravir ». La papillote joua le rôle d’une révélation et je compris qu’il ne tenait qu’à moi de définir la beauté autrement.
A bien y réfléchir, heureuses dans nos costumes de théâtre nous ressemblions comme deux gouttes d’eau à des alpinistes-dadaïstes en pleine ascension du Mont-Everest, découvrant à chaque coup de piolet des beautés toujours plus surprenantes.
L'édito de Janvier 2021
Nous avions entamé les répétitions de La saga de Molière à Avignon depuis quelques jours et j’étais bien décidée, non sans prétention, à fabriquer un chef d’œuvre. J’avais fini par me persuader que je vivrais la même carrière que Molière, sachant qu’il avait longtemps souffert d’être un remarquable comédien comique sans la moindre étoffe tragique. A mon tour, je nous reprochai d’être des pitres sans étoffe.
J’espérais écrire une scène soutenue par les accords nocturnes de Chopin dans laquelle on parlerait de la vacuité de l’existence : « Vanités des vanités, tout n’est que vanité ! » Je demandais à Naïs, Anne-Sophie, Edith et Julie d’incarner ces mots avec émotion, celle qui confine parfois à un pur plaisir d’esthète, de celle que l’on touche quelque fois dans des moments de lucidité totale. Ce fût un cuisant échec. Je pensais en moi-même jusqu’à le dire à voix-haute : - « Mais alors quoi ?! Nous ne parviendrons jamais à écrire et à jouer quelque chose de beau ?! » Immédiatement après avoir prononcé cette phrase, il y eut une montagne dans ma tête dont le sommet était enneigé : « - Voilà ! » me disais-je en moi-même, « - Voilà la beauté, parfaite, majestueuse, inégalable. » L’heure du goûter avait sonné et je tombais sur un de ces proverbes que l’on trouve d’ordinaire dans des papillotes bon marché : « Tous les hommes pensent que le bonheur se trouve au sommet de la montagne alors qu’il réside dans la façon de la gravir ». La papillote joua le rôle d’une révélation et je compris qu’il ne tenait qu’à moi de définir la beauté autrement.
A bien y réfléchir, heureuses dans nos costumes de théâtre nous ressemblions comme deux gouttes d’eau à des alpinistes-dadaïstes en pleine ascension du Mont-Everest, découvrant à chaque coup de piolet des beautés toujours plus surprenantes.